Ce compte-rendu fait écho à l’épisode 21 de la saison 02 de notre podcast dédié au régime fiscal dit des impatriés, lequel fait d’ailleurs suite à une jurisprudence récente concernant les conditions d’application de ce régime codifié à l’article 155 B du Code général des impôts (CGI). En effet, par un arrêt du 10 juin 2022, la Cour administrative d’appel de Paris a considéré que ce régime destiné aux « salariés appelés de l’étranger » a vocation à s’appliquer à une personne qui s’est portée candidate à une offre d’emploi en France (CAA Paris, 10 juin 2022, n° 20PA02279).

Cette décision, qui méritera d’être confirmée et qui remet en cause tant la position de l’administration fiscale que l’interprétation classiquement admise de la notion de « salariés appelés de l’étranger », est l’occasion pour nous de faire un rapide tour d’horizon de ce régime fiscal.

Le régime fiscal des impatriés permet aux salariés et dirigeants de sociétés venant exercer leur activité professionnelle en France de bénéficier de mesures temporaires d’exonération d’impôt sur le revenu à la double condition :

  • De ne pas avoir été fiscalement domiciliés en France (au sens de l’article 4 B du CGI ou des conventions fiscales internationales) de façon ininterrompue au cours des cinq années civiles précédant celle de leur prise de fonctions en France ;
  • De fixer en France leur domicile fiscal à compter de leur prise de fonctions en France.

Ce dispositif concerne donc les salariés et dirigeants appelés de l’étranger à occuper pendant une période limitée un emploi dans une entreprise établie en France, que ces personnes soient recrutées directement à l’étranger par l’entreprise établie en France ou qu’elles soient appelées par une entreprise étrangère auprès de l’entreprise établie en France (i.e. mobilité intragroupe). C’est pourquoi, l’administration fiscale considère classiquement que ce dispositif ne s’applique pas aux personnes venant exercer un emploi en France de leur propre initiative (BOI-RSA-GEO-40-10-10 n° 80) ; position donc remise en question par la Cour administrative d’appel de Paris.

Lorsque les intéressés y sont éligibles, ils bénéficient alors d’une exonération partielle d’impôt sur le revenu à la fois sur leurs revenus d’activité et sur certains revenus patrimoniaux de source étrangère jusqu’au 31 décembre de la huitième année civile suivant celle de la prise de fonctions en France (cinquième année pour les prises de fonctions antérieures au 6 juillet 2016).

S’agissant des revenus d’activité, tout d’abord :

1. Cette exonération porte, d’une part, sur les suppléments de la rémunération liés à l’exercice de l’activité professionnelle en France ou prime d’impatriation. En principe, cette prime est exonérée pour son montant réel, sauf option pour l’évaluation forfaitaire à hauteur de 30% de la rémunération nette totale.

Dans tous les cas, la part de la rémunération imposable en France doit rester comparable à la rémunération servie au titre de fonctions analogues dans la même entreprise ou, à défaut, dans des entreprises similaires établies en France. Le cas échéant, les personnes concernées doivent être en mesure de justifier par tous moyens du respect de cette condition pour bénéficier de l’exonération. L’administration fiscale suggère à ce propos qu’elles pourront produire une attestation de leur employeur (BOI-RSA-GEO-40-10-20 n° 120). À défaut, la différence est réintégrée dans la rémunération imposable.

Il convient de noter que l’administration fiscale peut parfois se montrer particulièrement regardante sur la rédaction de cette attestation et notamment sur les éléments qui y sont contenus ; de plus, nombre de contribuables peuvent se rendre compte de ne pas être éligibles à cette exonération – ou, à tout le moins, pas dans les mêmes proportions – lorsqu’ils sollicitent une attestation de leur employeur. C’est pourquoi, il convient d’être particulièrement vigilant lorsque vous souhaitez opter pour cette exonération de 30% de votre rémunération nette totale, le cas échéant en vous faisant assister d’un avocat fiscaliste. En effet, nombre d’impatriés optent hâtivement pour cette évaluation forfaitaire de la prime d’impatriation, de leur propre initiative ou sur les conseils de leur prestataire déclaratif, sans disposer d’éléments suffisants.

2. Cette exonération des revenus d’activité porte, d’autre part, sur la fraction de rémunération (salaire de base et, éventuellement, suppléments de rémunération) correspondant à l’activité exercée, le cas échéant, à l’étranger à la condition que les séjours réalisés à l’étranger soient effectués dans l’intérêt direct et exclusif de l’employeur.

S’agissant des revenus patrimoniaux, ensuite :

L’exonération porte sur la moitié du montant des revenus suivants :

  • Revenus de capitaux mobiliers, quel que soit leur régime d’imposition (e.g. revenus distribués, produits de placement à revenu fixe, etc.) ;
  • Produits de droits d’auteur perçus par les intéressés et leurs héritiers ou légataires, produits de cession ou de concession de droits de la propriété industrielle (e.g. brevets, marques etc.) perçus par les inventeurs ainsi que les produits perçus par les créateurs de logiciels indépendants ;
  • Plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux lorsque le dépositaire des titres, ou à défaut la société dont les titres sont cédés, est établi hors de France. Corrélativement, les moins-values éventuellement constatées sur ces titres sont comptabilisées à hauteur de 50 % de leur montant.

Le paiement de ces sommes doit avoir été effectué par une personne établie hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale.

Pour résumer, le régime fiscal des impatriés est donc très intéressant pour les personnes qui y sont éligibles mais compte tenu des écueils pratiques qu’il peut soulever, nous vous recommandons, en cas de doute, de faire appel à un cabinet ayant développé une expertise dans ce domaine tel que CBV Avocats.

En espérant que ces quelques éléments vous permettront de mieux appréhender les caractéristiques de ce régime fiscal particulier, n’hésitez pas à nous contacter en cas de questions.